• CHERCHEUR - ÉDITEUR

    Les origines lointaines

    Des sculptures du 12ème siècle dans les églises des Landes démontrent que la connaissance de la cornemuse est très ancienne dans notre département.

  • COLLECTEUR - FABRICANT

    la boha et la gadjy

    MYSTERE ! La boha est très différente des autres cornemuses de France mais très semblable à la cornemuse slovaque ou hongroise.
  • CHERCHEUR - ÉCRIVAIN

    L'omelette des bergers

    La première photo de la boha date du 19ème siècle. Nous la devons à Félix Arnaudin, Ferdinand Bernède au travers de ses célèbres cartes postales a également contribué à populariser la cornemuse landaise.
  • CONFÉRENCIER - ÉCRIVAIN

    Un univers incroyable et insolite

    Yan Cozian a publié de nombreux ouvrages : livres, CD et DVD

CONFÉRENCIER - CHERCHEUR - FACTEUR D'INSTRUMENTS - ÉDITEUR

LA BOHA

LA BOHA, LA CORNEMUSE DES LANDES DE GASCOGNE

Un instrument très différent des autres cornemuses de France.

LA BOHA, LA CORNEMUSE LANDAISE.

Un territoire historique.

Historiquement cette cornemuse était jouée principalement dans le département des Landes et également dans le sud de la Gironde et l’est du Lot et Garonne.
Si l’on doit se référer à un territoire identifié, ce serait celui des landes de Gascogne.

A présent, comme pour tous les instruments, la boha, est jouée bien au delà de l’aire de jeu historique.
Nous dénombrons par exemple des bohaires en Espagne, en Italie et au Royaume Uni.

Des noms multiples pour un même instrument.

 

Historiquement, en langue gasconne, cette cornemuse est dénommée de trois façons différentes :
La boha (le bouhe), la bohaussac (le bouhaussac) ou la chalamina (le tchalemnine).
Source : « Chants populaires de la Grande-lande », Édition établie et présentée par
Jacques Boisgontier et Lothaire Mabru. Oeuvres complètes, tomes III & IV, Confluences/Parc naturel régional des landes de Gascogne, 1995 -1997
C’est le terme de boha (bouhe) qui est le plus courant.

En français la dénomination fut tardive, au commencement, des ethnomusicologues l’on appelée : cornemuse des Landes et cornemuse landaise puis dans les années 1980 s’est ajouté le vocable : cornemuse des landes de Gascogne. Les trois noms cohabitent.

Des caractéristiques fondamentales : Qu’est-ce qui en fait une boha ?
La boha est un instrument tout à fait atypique parmi les cornemuses du domaine français. Ces spécificités résident principalement dans trois caractéristiques :
La première, ce sont les deux tuyaux de jeu parallèles, qui sont sur une même pièce de bois, le pihèt. Alors que généralement chaque perce est sur une pièce de bois spécifique.
La deuxième, réside dans l’anche simple du tuyau mélodique, ce qui lui donne ce timbre tout à fait particulier. Les autres cornemuses fonctionnent sur le principe du hautbois, elles possèdent une anche double.
Enfin, la troisième, est son tuyau d’accompagnement, le contre qui permet de jouer deux notes et donne au musicien la possibilité de créer rythmes et polyphonies.

Vous pourrez entendre le timbre de ces cornemuses en écoutant l’extrait musical qui se trouve sur You tube : La boha de Jean Lestage : Comment se joue la boha : vidéos positions des doigts

Le fruit probable d’une évolution.
La complexité organologique de cette cornemuse laisse à penser que cet instrument est certainement, comme pour de nombreux instruments, le fruit d’une lente évolution.
Il est peu probable qu’une personne se soit réveillée un jour avec la révélation d’une cornemuse à inventer et qu’il ai percé deux tuyaux sur la même pièce de bois en ajoutant le brunider à l’extrémité.
Il est plutôt envisageable qu’au fil du temps et de l’imagination des musiciens, un deuxième tuyau ait pu s’ajouter au premier, puis par la suite qu’une rallonge ait été aboutée, jusqu’à répondre au besoin du musicien.

Ce qui est certain, c’est que les instruments de la fin du XIXème ou du début du XXème siècle, que nous avons retrouvés ou qui ont été observés pouvaient être légèrement différents : 6 ou 7 trous de jeu, des anches en roseau ou avec des supports en plomb, un brunider percé d’un trou.
Source : MABRU Lothaire. « La cornemuse des landes de Gascogne », Belin-Beliet : Centre Lapios/Cahiers du Bazadais, éd. Les Amis du Bazadais, 1986.

Le déclin et le renouveau de la boha.
A partir du début du XXème siècle, de nombreuses causes convergentes ont conduit au déclin progressif puis à la disparition de la boha : apparition d’instruments plus modernes, nouvelles modes, nouvelles danses…

Une tradition en constante évolution:

Le renouveau de la boha a eu lieu dans les années 70, les tonalités jouées étaient proches de do et sib.

Pendant plus de 20 ans, de 1970 au milieu des années 90, les facteurs d’instruments ont reconstitué à l’identique les cornemuses retrouvées. Ces bohas par de nombreux aspects répondaient à des caractéristiques proches de celles des musiciens d’autrefois. Notamment un volume sonore puissant qui était nécessaire pour se faire entendre des danseurs à une époque où les sonos n’existaient pas. Mais pour nous, les jeunes musiciens de l’époque, nous vivions généralement cette puissance sonore comme un inconvénient, un obstacle à notre pratique de jeu naissante. Nos voisins de jeu aussi, il était difficile à un violon ou une vielle à roue de se faire entendre lorsqu’une de ces bohas jouait.
Dans les années 80, la plupart des accordéonistes ont choisi de passer de l’accord do/fa au sol/do et les tonalités des cornemuses ont suivi. En baissant d’une quarte, en devenant plus grave, le volume sonore a diminué et le timbre s’en est trouvé énormément modifié. Il est devenu plus approprié à nos occasions de jeu mais plus éloigné de l’original.

Sur l’impulsion d’Alain Cadeillan au milieu des années 80, l’organologie de la boha a évolué.
Ce bricoleur de génie, a réussi, par un astucieux système de bouchons, à élargir les possibilités de l’instrument en ouvrant de nouveaux trous de jeu. Et puis, il a également mis au point la possibilité d’accorder le brunider en mode mineur et mis au point un bourdon de poche.
Au début des années 90 ce type d’organologie a commencé à se diffuser et aujourd’hui la majorité des bohaires jouent sur des pihets à 8 trous de jeu.

Vidéo sur type de jeu boha à 8 trous + bourdons

« EN ATTENTE VIDEO »

Pour la découvrir un peu plus en détail : http://www.cornemuselandaise.fr/

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LA FABRICATION

UN SAVOIR FAIRE UNIQUE

L’atelier de Yan Cozian
La gamme est large, elle va de la boha ancienne à 5 trous
jusqu’aux instruments possédant des trous alternatifs et des bourdons supplémentaires.

CONFÉRENCES

Laissez vous emporter au pays gascon et découvrez la boha et toutes ses cousines de France, d’Europe ou du Maghreb. Guidés par la parole enthousiaste et poétique de Yan Cozian vous racontant les instruments de la Grande Lande ou la danse gasconne, vous goûterez la saveur de la musique traditionnelle. Une musique en perpétuelle évolution, comme le sont les artistes qui la défendent.

Ces conférences peuvent prendre des formes variées et s’adressent aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Consultez-nous pour un montage « à la carte ».

Ecouter des conférences radiodiffusées

Colloque LA CORNEMUSE LANDAISE

- Abbaye d'Arthous - 2006

PROGRAMME

COMPTE RENDU

PUBLICATION DES ACTES

Les actes du colloque ont été publiés, sont disponibles et peuvent être commandés au Centre départemental du Patrimoine – abbaye d’Arthous – Tél. : 05.58.73.03.89.
Merci encore au Conseil Général des Landes d’avoir perçu l’importance qu’il y avait à réunir toutes ces personnalités qui ont marqué le renouveau de notre cornemuse.
Ces journées de travail nous ont permis de comprendre, d’analyser tout un pan de l’histoire de notre patrimoine musical landais.
Vous trouverez ci-joint en fichiers téléchargeables une partie des interventions de Yan.
Bonne lecture !

– Jeanty Benquet analyse du jeu d’un musicien routinier Par Yan COZIAN : Télécharger

– L’Évolution organologique de l’instrument : Télécharger

– La démarche d’un musicen : Télécharger

– Transmettre et enseigner la cornemuse landaise : Télécharger

EN SAVOIR PLUS Fermer

Plaquette descriptive des thèmes de

conférences proposés

PLAQUETTE VERSO

PLAQUETTE RECTO

COLLECTAGE

HÉRITAGE INSOLITE :

INSTUMENTS DE MUSIQUE DANS LANDES ET EN GASCOGNE

Les Landes possèdent un patrimoine instrumental d’une grande richesse et une pratique
musicale d’une incroyable originalité.
Imaginez des trompes d’appel que les musiciens brisent à la sortie de la messe, une
cornemuse aux origines mystérieuses, un hautbois à anche triple qui n’a jamais pu être
reconstituée. Ce sont là quelques exemples des trésors insolites de nos Pays landais que
vous allez découvrir dans ce livre.
Ajoutez des centaines de musiques et de chansons, la plupart en Gascon et vous aurez un
aperçu de l’abondance du répertoire collecté.
Ces instruments, ces pratiques sont-elles une spéciGicité du territoire landais ou la
conjonction d’apports extérieurs ?
Il est certain que l’enclavement de la Grande Lande, la difGiculté de se déplacer sur ce
territoire jusqu’à la Gin du XIXème siècle ont permis que la pratique d’instruments
traditionnels perdurent plus longtemps qu’ailleurs. Les instruments « modernes »,
l’accordéon, la vielle à roue ont été adopté bien plus tardivement.

Il faut ajouter à cela une véritable aubaine : les
recherches et publications de notre folkloriste
Félix Arnaudin qui a collecté des dizaines de
témoignages, réalisé des photos et acheté des
instruments dont la pratique était en voie
d’extinction. Véritable quête de la mémoire et
du renouveau des musiques traditionnelles

Nous souhaitons regrouper toutes ces informations au sein d’un même ouvrage destiné à
valoriser notre patrimoine musical passé et présent auprès des habitants des Landes,
des visiteurs de nos contrées et des passionnés des musiques traditionnelles

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Boha ! Au cœur des Landes :

Un travail de collecte à la rencontre de ceux qui ont sauvegardé la mémoire de la boha

La réalisation d’un travail de collecte.

La Boha, la cornemuse landaise est un instrument de musique emblématique de la culture et du patrimoine des Landes.
Il est vrai qu’elle ne ressemble pas aux cornemuses des autres régions de France.
Elle est originale au point que lorsqu’il a fallu lui donner un nom en français, les ethnomusicologues ont choisi celui de notre département : landaise !

Son histoire, notamment celle du renouveau de sa pratique est riche pourtant elle n’avait jamais été collectée. Le chantier global étant d’envergure il a été choisi de le circonscrire dans un premier temps au département des Landes.

A la rencontre de ceux qui ont sauvegardé la mémoire de la boha.

Durant l’été 2012, nous avons sillonné le département des Landes à la rencontre de ceux qui ont un jour, d’une façon ou d’une autre, croisé le chemin de notre cornemuse landaise et ont voulu participer à sa promotion et à sa sauvegarde.
Notre objectif a été de recueillir et filmer les témoignages.
Nous avons rencontré les musiciens « historiques » Joseph Barsacq, Jean et Jacques Baudoin, Patrick Benquet, Didier Deblonde, Nano Dupin. Notre démarche s’est portée également vers les chercheurs Jean Tucoo-Chala, Geo Lasserre, les musiciens, fabricants actuels et les institutionnels qui se sont investis dans la promotion de la boha.
Ces rencontres ont été riches en échanges, en informations et ont confirmées que le renouveau de notre boha est une extraordinaire aventure humaine. Également la bonne surprise de découvrir un pihet ancien qui à notre connaissance n’a pas été recensé.

Ces nombreuses heures de témoignages enregistrés seront n’en doutons pas une mine précieuse de données pour les futurs chercheurs.

L’équipe de tournage est constituée de Bernard Couhault, rédacteur en Chef honoraire de France 2 et Arnaud Tartinville, caméraman professionnel.

Les partenaires.
Ce projet est soutenu par
Le Pays Adour Landes Océanes porteur des fonds européens Leader et d’Etat, Le Conseil Général des Landes,
Le Conseil Régional d’Aquitaine,
La communauté de communes Maremne Adour Côte-Sud,
Les villes de Soustons et de Labouheyre.

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Paraulas e Musicas :

220 partitions de chansons et musiques recueillies dans les Landes de 1960 à nos jours.

Edition bilingue –français/gascon- de chansons et musiques de tradition orale, recueillies dans les Landes de 1960 à nos jours.
Nous connaissons tous le remarquable travail d’enquête effectué par Félix Arnaudin à la fin du XIXe siècle. Il y a quelques années, ses travaux ont été réédités ce qui atteste de tout l’intérêt que le public peut porter à ce type d’ouvrage.
Depuis cette œuvre de collecte qui s’est terminée en 1910, il n’y a pas eu de nouvelles publications de mélodies populaires interprétées dans notre département. Pourtant il en est de nombreuses et inédites qui ont été recueillies notamment entre les années 1975 et 1995.
A présent, les informateurs ont disparu et les jeunes collecteurs de l’époque ont maintenant entre 55 et 65 ans. Jusqu’à ce jour, ces collectages, n’avaient pas été retranscrits.
Il a semblé primordial à l’auteur de donner à chacun la possibilité de pouvoir accéder à la richesse de notre patrimoine musical, et de le transmettre aux générations futures. C’est aujourd’hui chose faite au travers de ce livre qui réuni plus de 200 mélodies, chansons ou danses qui n’avaient pas été notée au début du XXe siècle par Félix Arnaudin. Cet ouvrage intéressera tout naturellement les musiciens traditionnels de Gascogne et d’ailleurs mais également tous les amoureux de la culture et de la langue gasconnes.
Présentation de l’ouvrage
– Format 20×21.
– Présentation bilingue des contextes culturels et musicaux.
– 220 partitions avec les paroles en gascon (lorsqu’elles ont été collectées) et leur traduction en français.
L’auteur
Yan Cozian, musicien et un chanteur connu et reconnu dans la sphère des musiques et danses traditionnelles, est responsable du département musiques et danses traditionnelles au Conservatoire des Landes.
Chercheur, il a publié de nombreux ouvrages et a été le concepteur du colloque « cornemuses landaises » et le coordonnateur de la rédaction de ses actes.
Les acteurs de cette édition.
Préface de Jean Jacques Casteret, ethnomusicologue.
Articles sur les informateurs par Michel Harismendy, collecteur et Jean Tucoo-Chala, conservateur.
Dessins originaux de Sylvie Forestier, artiste bayonnaise.
L’Institut Occitan – In’Òc – pour les traductions.
Antoine Roque de l’Atelier des Brisants et En Companhia pour la co-édition.
Le Conseil Général des Landes pour le soutien à ce projet.

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Campanaire :

Le Conseil Général des Landes avait confié à Yan Cozian la mission de collecter les derniers sonneurs de cloches du département des Landes.

Il a collaboré avec Monsieur Vincent Matéos et ça a été pour lui l’occasion de découvrir un univers sonore et humain qu’il ne soupçonnait pas.

Le sonneur de cloche, un personnage au centre de la cité et hors du commun.

Dès ma première rencontre avec les sonneurs de cloches, j’ai rapidement perçu que je me trouvais en face de personnages hors du commun. Sonner les cloches allait bien au-delà de la simple émission d’un ou de plusieurs tintements dans le but de donner l’heure. C’est une véritable dimension sociale qui incarne le sonneur de cloche, à la fois interprète, informateur. Il est respecté par tous et on lui attribue des pouvoirs parfois surprenants, voire dérangeants pour l’Homme du XXIème siècle que nous sommes.

Même si elle n’est pas toujours totalement identifiée, il n’échappe à personne que le sonneur de cloche à une fonction, celle d’informer. Lorsqu’il sonne l’angélus, l’appel à un office religieux ou le tocsin il communique des informations codées et que chacun pouvait aisément comprendre. Parfois le langage codé était tellement précis que l’on pouvait même savoir qui venait de décéder.

Il est donc aisé de comprendre que le sonneur de cloche par cette proximité qu’il a avec le religieux en général et la mort en particulier est un personnage hors du commun. Et quand on sait de surcroît qu’il s’attribue et que le village lui attribue aussi le pouvoir de disperser les nuages de grêle, hantise de l’agriculteur nous passons dans une autre dimension quasi chamanique qu’il nous est aujourd’hui difficile de percevoir. Pour en revenir à une approche plus musicologique, approcher les sonneurs de cloche, c’est rencontrer un des acteurs sonores survivant d’un monde rural qui n’en finit pas de disparaître dans lequel la musique, le chant, les appels étaient autrefois le quotidien.

Le sonneur de cloche, informateur, interprète ou musicien?

Lorsque la question m’a été posée de savoir qui sont ces sonneurs et notamment si ce sont des musiciens il m’a été difficile d’apporter une réponse formelle. Ne serait ce qu’à cause du faible nombre de survivants de cette pratique en voie d’extinction.
Toutefois l’analyse des contextes et pratiques que j’ai pu observer m’amène plusieurs réflexions et quelques ébauches de réponses.

La cloche, un instrument de musique à part entière.

Il est intéressant d’analyser la façon qu’ont les sonneurs de se servir de l’instrument en recherchant à obtenir deux sons différents. Le cas de figure le plus évident à observer est lorsqu’il y a deux cloches et que le sonneur prend un battant dans chaque main et alterne les sons de chacune. Mais ce qu’il y a de remarquable c’est la pratique que développent les sonneurs qui n’ont qu’une cloche à leur disposition. Ils prennent un galet dans chaque main et alternent main droite et main gauche en recherchant des timbres différents sur la cloche. Tout percussionniste traditionnel, africain ou cubain vous dira qu’à partir du moment où leur instrument peut produire ces deux sons distincts, ils peuvent improviser, composer, interpréter. Le joueur de triangle de l’orchestre symphonique se trouve lui aussi dans le même cas de figure. Il apparaît ainsi que l’instrument « cloche » me semble propice à séduire un instrumentiste et à lui offrir un champ d’expression très large.

Le sonneur de cloche, un interprète passionné.

Il est incontestable que les sonneurs sont tout à fait conscients de ces possibilités de jeu que permet l’alternance des frappes. Ils les exploitent totalement faisant ainsi varier les intensités, les rythmes, les timbres. Ils s’investissent réellement, totalement dans leur interprétation. J’ai en mémoire le collectage d’un angélus sonné par la même personne de façon très différente selon que je sois à côté d’elle ou qu’elle ignore ma présence. Selon qu’il souhaite « épater » ou « punir » son auditoire, l’interprète car c’est bien de cela qu’il s’agit, l’interprète donc peut créer volontairement des résultats sonores très différents.

Toutefois, si nous abordons cette question avec le sonneur, porteur des préjugés en ce domaine, il contestera lui-même le qualificatif de musicien pour plusieurs raisons.

En premier lieu il vous dira « ne pas connaître la musique » induisant ainsi qu’il ne joue pas une musique en s’aidant d’une partition écrite. En cela il est victime du même complexe que les musiciens traditionnels qui faisaient danser pendant des heures et niaient leur statut de musiciens quand on leur posait la question. Pourtant le sonneur est le survivant en droite ligne de ces musiciens populaires, acteurs du monde rural jouant leur partition orale, la répétant en chantant. Tous ces sonneurs que j’ai rencontré, répétaient, révisaient, reproduisaient chez eux les séquences qu’ils auraient à réinterpréter les jours suivants dans leur clocher. Ces sonneries frappées sur la table ou encore chantées sont des plus émouvantes et n’ont d’autre fonction pour le sonneur que de maintenir la mémoire et la qualité de son interprétation.

En second lieu, il expliquera que sa tâche réside dans le fait de sonner pour informer et donc par là même ne pourrait être considéré comme un artiste comme si l’aspect « utile » enlevait de la valeur à sa pratique. A l’analyse cette approche s’avère erronée. Nous pouvons constater qu’autrefois, la musique de fonction était partagée avec d’autre musicien. Le joueur de clairon en est un exemple. Lui aussi avait une fonction et un répertoire bien définis et personne ne remettait en cause son statut de musicien.

En plus de ces arguments d’écriture musicale et de fonctionnalité, certains pourraient également arguer que l’interprétation d’un répertoire réduit ne pourrait leur octroyer ce statut de musicien.
Mais ce serait méconnaître le principe même de la musique traditionnelle et populaire.

Une âme d’artiste

Tous ces sonneurs que j’ai eu la chance de rencontrer sont conscients du pouvoir qu’ils détiennent et de l’intérêt qu’ils suscitent auprès de la population et des notables locaux. Cette position engendre de nombreux comportement « cabotins » comme la propension de se faire prier pour jouer ou comme évoqué précédemment le fait de modifier son interprétation selon l’auditoire. Et lorsque nous abordons la question de la transmission de leur savoir faire, jaloux de leur art, ils font souvent en sorte d’évincer les apprentis potentiels de crainte d’être supplantés et de perdre la vedette.

En résumé, en observant ces acteurs d’une pratique en voie d’extinction, nous avons pu constater que le sonneur s’approprie l’instrument, qu’il est conscient d’être écouté, lui même à l’écoute des réactions de son public, qu’il adapte son jeu aux circonstances et à l’auditoire et enfin qu’il répète son jeu hors contexte. Nous sommes bien en présence d’un interprète, d’un musicien mais aussi d’un artiste dans l’âme.

Ces artistes nous ont côtoyés et nous côtoient encore dans les quelques rares villages où ils sonnent toujours, mais bien souvent ne les avons nous pas ignorés. Plus enclins à nous émerveiller à l’écoute d’un tambour traditionnel africain ou d’un chanteur Pygmée nous avons pour le moins négligé l’extraordinaire richesse musicale du sonneur de cloche qui vit à côté de nous. Lo prat deu vesin… le pré du voisin…. est décidemment toujours plus vert.

Yan Cozian

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